Services d’aide à domicile : un rapport très attendu mais partiel
Le collectif de l'aide et du soin à domicile réclamait depuis de nombreux mois la publication du rapport commandé début 2010 par le Gouvernement à l'Inspection Générale de l'Action Sociale (IGAS) et l'Inspection Générale de Finances (IGF). Ce rapport qui a été finalisé en octobre vient d'être rendu public le 25 janvier 2011. A l'heure où le débat sur la dépendance et le 5ème risque est lancé, c'est bien la question de l'accompagnement et de la place dans notre société des personnes vulnérables de tout âge ayant besoin d'aide à l'autonomie, qui est posée.
Depuis trois ans, les services d'aide à domicile ont vu leur trésorerie diminuée d'un tiers (paiement en retard de la part des financeurs publics, bénéficiaires ne pouvant pas payer le reste à charge....).
Face aux difficultés économiques de plus en plus croissantes, les organismes publics et privés à but non lucratif (associations, centres communaux d'action sociale, mutuelles) rassemblés dans un collectif demandent depuis plus d'un an que le système de financement soit revu : le rapport IGAS/ IGS reconnait cette nécessité.
Un rapport attendu mais partiel
Si la mission confiée à l'IGAS et l'IGF était particulièrement attendue par les acteurs de l'aide à domicile, il est regrettable que ce rapport ne porte que sur les services d'aide à domicile en direction de public âgé (personnes de plus de 60 ans en manque d'autonomie, personnes âgées de plus de 70 ans) ou en situation de handicap.
L'aide aux familles à domicile est ainsi exclue ! Cela est d'autant plus dommageable que la suppression des exonérations par la loi de finances 2011 entraîne un surcoût de 8 à 12 % des interventions auprès des familles fragilisées.
Par ailleurs, le rapport remet en question la cohérence entre les modalités d'intervention et la protection des personnes dépendantes. Une simplification abusive est faite en laissant entendre que le service mandataire pourrait aisément répondre aux besoins d'aide aux personnes dépendantes classées en GIR 4, 5 et 6 (personnes les moins dépendantes), considérant que ces aides ne concernent que le ménage.
Des marges de manœuvres réduites pour les services d'aide à domicile
Le rapport constate que les marges de manœuvre des services sont très restreintes. En effet, quel que soit le statut de la structure (privée, publique, à but non lucratif ou lucratif), le coût de service repose principalement sur les dépenses de personnel, soit de 80 à 90%.
Comme l'indiquent les rapporteurs dans leur conclusion, « la politique de qualification des personnels, encouragée par tous, est légitime car répondant à la double préoccupation d'une meilleure prise en charge des bénéficiaires et d'une valorisation des parcours professionnels dans un secteur qui peine à recruter ; mais il faut alors assumer les surcoûts qu'elle implique » . C'est bien en s'appuyant sur cette légitimité que les efforts de qualification, de professionnalisation et de protection des salariés ont été constants, dans un secteur ayant le souci d'offrir une aide de qualité au domicile des personnes.
Assumer une politique sociale efficiente
Sur les seize recommandations faites à l'issue de la mission, seulement trois s'adressent aux services d'aide et d'accompagnement à domicile : développer la mutualisation, la coopération et une durée minimale d'intervention. Le rapport, comme le collectif, souligne que les problèmes rencontrés par les services d'aide à domicile proviennent d'une incapacité financière, notamment des Conseils généraux à assumer « la prise en charge de la dépendance sur des bases inchangées ». La véritable question posée est celle de la volonté politique d'assumer collectivement la prise en charge de la dépendance.
Alors que le rapport confirme le diagnostic posé par le collectif, nous réitérons notre demande de réformer le système de financement et de tarification de l'aide à domicile, en étroite collaboration avec les acteurs du secteur, en prenant en compte :
- l'accès équitable à l'aide à domicile sur l'ensemble du territoire, particulièrement pour les publics fragiles,
- une politique de prévention pour retarder le plus possible la perte d'autonomie,
- les coûts liés aux conditions d'intervention,
- la qualification et la professionnalisation des salariés et la lutte contre la précarisation des emplois
- une régulation contractualisée pluriannuelle entre les structures et les financeurs publics.
Si aucune de ces mesures n'est prise dans les prochains mois, ce n'est plus une centaine de structures qui risquent de ne plus pouvoir aider les personnes et les familles, notamment en milieu rural et périurbain. Mais bien la disparition de tout un secteur représentant 220 000 salariés, essentiel à la cohésion sociale.